Lettre d’un infidèle à sa prétendante
Un pétale de rose
Un autre pétale de rose
Un troisième pétale de rose
Et ainsi se fane mon cœur
Comme tombe le sable
Dans le sablier

Très chère élue de mon cœur !
Imagine un être humain enfermé dans un lieu sans oxygène. Imagine-toi sans oxygène. Ici où je survis tu es mon oxygène. J’espère que toi aussi tu respires à l’autre côté de la planète. J’espère aussi que belle-mère et beau-père se portent bien. Quant à moi, je ne saurais me sentir mieux qu’après t’avoir faite cet aveu amer. Une mer de ressentiments se déverse sur mon cœur en proie à l’amertume. Ari qui s’excuse s’accuse. Et j’avoue d’ores et déjà que je mérite le bucher puisque la grandeur de mes péchés les rend inexpiables. Par ailleurs, devant l’échafaud des regrets où je me tiens debout mais vacillant, je formule le vœu que tu m’accordes le pardon un jour. Sache qu’ici les obstacles m’ont affaibli, m’ont abruti. En plus d’avoir des cheveux blancs, j’ai le cœur tout le temps en émoi à tel point que la magie de la cécité de Ray Charles ne me fait plus aucun effet. M’pedzi ma m’pedzi, sache qu’ici rien n’est facile ; heureusement que la paix est guerrière , sinon les guerres civiles auraient eu raison d’elle. Ici des fois la faim me fait sortir loin de la tanière de la joie de vivre, et je n’ai que mes larmes pour casser la croûte. Heureusement que tu existes, que je te respire, que le projet de faire ma vie avec toi, auprès de toi, me pousse à espérer. En effet, rien n’est facile quand on est un pauvre étudiant dans un pays étranger.
Le soleil se couche. Je vois des étoiles poindre dans le ciel. Sais-tu toi que j’aime que le ciel est le même partout dans le monde. Et heureusement que ce soit ainsi ! Sinon, je me sentirais encore plus seul, si seul. Oui, le ciel la nuit nous rapproche. S’il y a des mots pour dire « je t’aime ». Il y a sûrement des mots pour dire « pardonne-moi ». Et s’il y a aussi des mots pour dire « moi non plus ». Donc sûrement il y a aussi des mots pour dire « je te pardonne ».
Promise, ma promise. Il me serait injuste d’écrire à la première Lady monde, sur ma liste bien entendu, qui n’est autre que ma maman, pour lui faire l’inventaire de l’année qui vient de s’écouler et ne pas aussi écrire à celle qui la succède, à savoir toi. Je sais que tu m’aimes et que tu m’aimeras toujours. Et je sais aussi que tu vas me pardonner parce que tu es unique dans ton genre. Tu as reçu l’éducation qu’il faut pour pardonner un cœur égaré. Tu es une fille qui sait bien faire des choix même dans les moments les plus critiques. Tu arrives toujours à faire le bon choix malgré tout. Te souviens-tu de Jackito avec son tube Je l’Aime à Mourir. En fait, je suis devenu comme ce petit morveux. Je me surprends à parler de moi à la troisième personne du singulier. Oui, à soliloquer, tu te rends compte ? Des fois je m’adonne à des sérénades devant des immeubles. Une fois c’était devant le commissariat de police. Les policiers sont venus me déloger après que j’ai fait le moonwalk. Et tout ça je le fait inconsciemment. Pauvre de moi ! J’espère que ce n’est pas l’amour que je porte pour toi qui me rends taré comme Hamlet. Bref ! Ce n’est pas de cela dont je voulais te parler. Rassure-toi, ton Naoumane n’a pas encore perdu les pédales.
Promise, ma promise. J’ai fait des choses et je continue à faire des choses qui ne sont pas faciles à dire. Et comme je ne suis pas un Joachim Du Belley qui se plaignait par des vers, je ne sais pas comment procéder. Cependant je vais tout de même me plaindre à travers ces lignes. Je sais très bien que tu vas me comprendre après que t’auras lâché quelques ruisseaux. Puisque vous les filles c’est devenue une culture chez vous d’arroser vos fronts quand il est question d’émotion ou de compassion!
Dulcinée, ma dulcinée. La solitude est une sorte de haillon que tu portes malgré toi. Tu l’enfiles tout en attendant qu’une occasion se présente pour t’en débarrasser si vite que possible. Après avoir tenu le coup, durant plus de quatre ans, la tentation m’a tendu la main et je l’ai suivie à l’aveuglette. Ce n’est pas La tentation de saint Antoine de Gustave Flaubert mais plutôt du Grave flou-man! Pour ne pas dire Le Grave Naoumane!
Dulcinée, ma dulcinée. Je suis devenu le pire des «infidèles» sur terre. Un «chasseur de prime», ou plutôt un chasseur de la déprime, je crois. Puisque c’est surtout celle-là que je ramasse, de la dépression permanente. Je drague tout ce qui bouge. La solitude, l’outrage et le poids des études m’ont rendu un peu Casanova. Un peu j’ai dit. Ari, je tombe «amoureux» de n’importe qui et n’importe quand. Bien-aimée, si je dis «n’importe qui», c’est de filles dont je parle et non de gars. N’aie pas l’idée que je suis devenu un gay. NON, pas du tout. Pas à ce point, non ! Je sais quand même tenir «mon mal en patience». Bien que je t’ai trompée une fois, mais je te promets que cela ne se reproduira plus. Je te jure et s’il te plait, ne me dis pas ari «Qui a bu boira.». Avec le temps, je me suis rendu compte que c’est un proverbe menteur.
Petit cœur, mon petit cœur. Rassure-toi que je parle de toi bien-aimée, mais pas de Petit-cœur du manga Dragon Ball Z. Petit cœur, tout a commencé par internet, notamment par le biais de ce dit ari Facebook. Ce réseau social que je ne saurais ni maudire ni bénir. Dans un Mandara, un quartier populaire d’Alexandrie, cerné par le bruit des toc-tocs. Dehors. Sur le balcon. Au rythme des cris des vendeurs ambulants de «foul», de la fève et du gaz qui te bouille le ventre. J’essayais de me reposer un peu, et hop! Les mégaphones d’autres vendeurs de je ne sais pas quoi m’ont fait sortir de mon sommeil. Ainsi, je me suis décidé à passer mon temps devant l’écran de l’ordinateur de mon colocataire avec la promesse de draguer tous mes amis facebook affichant des profils féminins . Et à force de dire Ari « je t’aime bb » à toutes les filles qui me passent un «coucou» en ligne, j’ai fini par me faire avoir à plusieurs reprises. En fait, je suis tombé très souvent sur des garçons qui se faisaient passer pour des filles afin de jouer avec les sentiments des autres.

Petit cœur, mon petit cœur. Je sais que tu n’es pas comme «les filles d’aujourd’hui» qui courent de gars en gars. Pas pour se stationner mais plutôt pour faire une comparaison et remplir leurs listes d’amants et vanter leur palmarès. Je eu énormément de la chance d’avoir une fleur pareille, qui sent le parfum pendant la journée et le jasmin pendant la nuit. J’ai eu tellement de chance d’avoir croisé celle qui sait attendre peu importe la saison qu’il fasse. Que ce soit du kussi ou du chikazi-kazi, elle est toujours là sous la pluie comme sous le soleil, à attendre celui qui passe de Naoumane le Gentleman à «Naoumane le grave».
Beauté, ma beauté. Je sais ari «wulindra wu hodza na roho wukodza. Bé, ari, assu biri kajutsu!» dit le proverbe comorien, qui peut se traduire littéralement comme suit : «L’attente fait souffrir. Mais celui/celle qui sait patienter ne regrette point.» Alors sois patiente comme tu l’as toujours été. Je ne veux pas abuser de ta fidélité mais sache que si je traine par ici comme la Bohème de Rimbaud, c’est pour t’ «assurer» un avenir certain. Comme tu le sais bien qu’il n y a rien qui tient debout là-bas au bled! Seul le chômage, l’ennui et la médisance qui assurent la permanence et le bon accueil de la majorité de jeunes diplômés. C’est pour cette raison que je tiens à aller un peu plus loin dans les études malgré le mauvais coup du destin qui ne cesse de faire pleuvoir des épines et des clous sur mon passage.
L’élue de mon cœur, j’ai beaucoup à te raconter mais j’attends me retrouver auprès de toi. On va passer toute une nuit blanche sur la terrasse de votre maison et je vais donc te conter les mille et une nuits passées loin de toi au pays des Pharaons. Comme Shéhérazade dans ce recueil anonyme de Contes dit «Les Mille et Une Nuits», entre nos chansons indiennes préférées que je te chanterai, je te parlerai de fausses Cléopâtre et de faux Ramsès. Parce qu’ici je ne croise que de fourbes et de catins. Sois patiente alors, si tu veux entendre la suite…
https://www.youtube.com/watch?v=K7r0j6NWgmo
Pendant tout ce temps, j’ai réalisé que t’es la seule à être prête à supporter mes bêtises, à souffrir avec et pour moi. Promise, ma promise. Tu sais ce qui me tue chez toi, c’est ce dosage de patience et de sérénité qui vont de pair avec ton tempérament. Je ne parle pas de toi comme un ange mais comme mon ange, une des rares filles qu’on peut croiser sur cette terre . Sais-tu qu’avec l’âge, je me suis rendu compte que des filles il y en a des milliards, mais une fille comme toi, il y en a qu’une. Béni soit Allah qui t’a mis sur mon chemin.
Il n y a pas pire sur la terre que de connaitre des personnes qui te font croire qu’on est ami. Alors qu’ils ne le sont point. Des gens comme ça, j’en croise tous les jours. Des vénales gens, sans foi ni loi, qui sont persuadés que la vie est un western, le monde un Far West.
J’aurais aimé emprunter la plume de Pierre de Ronsard ou celle d’Alphonse de Lamartine pour t’écrire de beaux poèmes ou d’éloges pour me faire pardonner. Si j’étais capable, je t’aurais composé le plus bel acrostiche que le monde ait connu. Mais comme tu ne sais lire que mes lignes, alors j’ai la conviction que tu me comprendras.
Je vais devoir m’arrêter là pour ne pas t’embrouiller la tête. Salutations aux belles-sœurs et aux beaux-frères.
Bisou et à la prochaine in sha Allah!
Ton âme-sœur Naoumane
Commentaires