Comores : les racines d’un mal commun
Ari « l’Afrique noire est mal partie ». En tout cas, quelque cinquante années après les indépendances, l’Histoire n’infirme pas le propos. Au contraire, elle confirme que « les ennemis de l’Afrique sont les Africains » comme disait M. dreadlocks-là. En effet, les oiseaux de mauvais augure se révèlent être nous-mêmes, les Africains. D’ailleurs, des fois, je me surprends à me demander si Africain est méjoratif ou péjoratif. Eh oui, le miroir reflète le sorcier qui est en nous. Coups d’Etat militaires en vogue, rébellion à la mode, conspiration au sein des gouvernements, évasion, émigration, séparatisme font et défont notre quotidien.
N’a-t-on pas honte que quand on parle de notre très chère Afrique, à part les maladies qui nous rongent les âmes et amaigrissent nos anus, on ne parle que de la «fameuse rébellion dite Seleka », des « exploits des redoutables guerriers du M23 » ou de « rapts de shebabs », pour ne citer que ceux-là.
Je pense qu’avant de vouloir un niveau de développement équivalant aux standards européens, nos chers gouvernements du Sud devraient d’abord se pencher beaucoup plus sur la sécurité des Etats africains. Puisque sans une stabilité politique, on ne peut pas faire redémarrer la machine économique. Et sans une économie stable, il n y aura jamais une jeunesse prospère. Et sans cette jeunesse prospère, on ne peut pas ériger au sommet du Kilimandjaro la tour El-Afriquia (pour ne pas dire la tour Eiffel) que nous appelons tous de nos vœux. Pour finalement placer en haut de cette tour imaginaire le drapeau de l’Union africaine. Un drapeau qui rayonnera d’une aura de paix et d’équité l’ensemble du continent.
Parlons un peu de chez nous. Puisque ari « muntru ahimo buwa kasha, muntru wubuwa delahé », dit un proverbe de chez nous. Qui veut dire que si on ouvre une malle, on n’ouvre que la sienne.
Si on lit bien l’histoire de notre armée nationale, on remarque que les divisions et les malentendus qui se génèrent au sein de ce corps proviennent de loin. Ainsi fallait-il donc remonter l’amont, aller jusque-là où le bob de Denard a semé le germe du mal. Puis redescendre tout doucement. On saura donc qui sont les loyalistes qui se trouvent dans cette force censée protéger notre nation et non semer la dissension, voire le crime fratricide.
Mais si j’étais un Bradley Manning version comorienne, pour mettre la lumière sur l’affaire Combo ou plutôt l’affaire Dreyfus, je prêterais la plume d’Émile Zola pour écrire à mon tour « Je m’excuse !! », oh ! désolé Monsieur le président !!! Je voulais dire « J’accuse !! ». Ari «qui s’excuse s’accuse ». Et comme le suspect ressemble à quiconque portant l’uniforme de l’armée nationale ou un simple civil. Alors je demanderai la permission de nos supérieurs de me laisser une toute petite marge sur le quotidien national Al-Watwan . Pour évoquer encore une fois ce crime abominable jusqu’à maintenant impuni parce que non élucidé.
Il y a un autre facteur fondamental pour le développement d’un pays. Et qui reste malheureusement absent, jusqu’à lors, chez nous. Et cette absence est cause de tous les maux qui frappent à coup sûr la quasi-totalité des pays africains. Et ce facteur n’est autre que l’éducation.
Avons-nous vraiment reçu l’éducation qu’il fallait ? Ou sommes-nous seulement abreuvés par des connaissances de l’Occident qui sont en vrai éloignées de nos réalités quotidiennes. Je pense qu’on n’est pas du tout sorti de l’auberge. Que la confusion de cultures, des cultures africaines et de celles de l’Occident dont parlent Seydou Badian dans Sous L’orage et Cheikh Hamidou Khan dans L’aventure ambiguë , reste d’actualité. La dénonciation de ces deux grands auteurs de notre terroir n’a pas tordu le cou à l’acculturation dont nous ne cessons de subir. Ari le chemin est encore long devant nous !
Le système éducatif archaïque qui date depuis zama za m’colo (l’époque coloniale) laisse à désirer. Bien que les choses ont beaucoup changé, suivant l’évolution technologique, le niveau scolaire reste inchangé, toujours faible. Quant à nous, on est là avec nos tableaux noirs de ciment et de craies de chaux. Salles de classe dépourvues de tout, remplies de plus d’une trentaine d’élèves, de chaises bancales. Pas d’électricité, n’en parlons point de data Show. Par conséquent, quand le soleil se couche sur la chaîne montagneuse qui surplombe certaines localités, comme la nôtre, nous sommes donc contraints de terminer les cours. Ce qui fait que les heures d’apprentissage sont très limitées. Alors il ne faut pas s’étonner qu’un bon nombre d’élèves quittent l’école si tôt. On remarque donc une jeunesse de plus en plus extravertie, déscolarisée, facteur d’une montée de la délinquance, viol, crime… chose qu’on ne voyait qu’à la télévision. Et nos administrateurs, watwani gouroumand (des patriotes gourmands), qui occupent des postes clés depuis l’aube de l’indépendance, se plaignent de ces exactions qui ne cessent de gagner du terrain dans notre archipel, ne cèdent pas la relève aux jeunes générations pour apporter afin un sang neuf à ce corps rachitique appelé Etat comme mort : rien. Ces gourouma n’envisagent aucun éventuel changement en dehors des changements qu’ils opèrent au niveau de leurs maîtresses. Ils restent collés sur les chaises, comme s’ils sont nés avec, et se jugent compétents et capables de nous emmener sur la terre promise. Alors qu’on est là depuis plus de trente-cinq ans à gober goulûment leurs boniments. Bon sang ! Comme on aime bien entendre votre bagout ! Ainsi nous promet-on de temps en temps, malheureusement, l’Eldorado.
J’ignore quand le ferry qui nous amènera à Eden quittera le port de complaisance de Tsembehou. J’ignore qui m’ignore comme ce pays qui m’ignore dans cette ignorance totale de nos élus jamais élus que dans leur fantasme.
Ari «c’est sur le mauvais arbre que se pose l’oiseau de mauvais augure » d’après un proverbe songhaï. Du coup, No Comment !
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